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Fanny Vella : “J’ai mis en image mes propres questionnements”

Léa Héron 27 avril 2020
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Fanny Vella est illustratrice. Ses illustrations sont pleines d’humour, d’amour et de vérités parfois dures à entendre mais toujours bonnes à rappeler. Aujourd’hui, elle nous raconte son histoire et son métier qui est avant tout sa passion.

Bonjour Fanny ! Peux-tu te présenter en quelques mots ?

Bonjour, déjà un grand merci pour cette interview. Je suis donc Fanny, illustratrice depuis 3 ans. Je me suis lancée après la naissance de ma fille, je savais que j’aimais dessiner mais je n’avais alors pas conscience d’à quel point ce métier me permettrait de lier à la fois cette passion de l’image avec la possibilité d’y mettre du sens. Avant ça, j’ai travaillé pendant plusieurs années auprès d’un public porteur de handicap. Il m’était impensable d’abandonner totalement cette sensation d’agir socialement. C’est pour ça que j’oriente principalement mes illustrations vers des thèmes qui me touchent.

Comment as-tu commencé le dessin ? As-tu déjà été intéressée par d’autres formes d’art ?

Je crois que j’ai commencé comme tous les enfants du monde et que je ne me suis juste pas arrêtée. Je ne sais même pas pourquoi je me suis acharnée parce que je n’ai pas de facilité particulière dans le domaine. Mais je crois que c’est vraiment le média qui me plaît le plus et mon cerveau est assez à l’aise dans l’exercice du “un dessin vaut mille mots”. J’aime l’art en général, je suis fan de littérature, de cinéma, de séries, de BD… Je suis fascinée par l’imagination et l’art de raconter une histoire. Si je n’avais pas réussi dans le dessin, j’aurais eu besoin de créer par n’importe quel autre moyen. Je n’ai aucune idée de vers quelle autre forme d’art j’aurais pu me tourner mais je suis aussi dans une troupe de théâtre alors peut-être qu’écrire des pièces aurait pu être une alternative.

Dans tes illustrations tu abordes des sujets importants, souvent graves, qu’est-ce qui t’a donné envie d’en parler ?

On ne va pas se mentir, je crois qu’on a besoin d’être profondément touché.e par une problématique pour vouloir s’en emparer et lui donner aussi de la voix. Parfois, cela passe par le fait d’avoir soi-même vécu la situation, c’est mon cas quant au thème des violences conjugales. J’ai eu besoin d’extérioriser, ça a vraiment été thérapeutique de parler de mon histoire. Au sujet de l’éducation, j’étais dans un processus de déconstruction des normes éducatives bien ancrées dans ma tête, j’ai mis en image mes propres questionnements. Dans les deux cas, c’est en voyant le bien que mon propre cheminement autour de ces thèmes pouvait provoquer que j’ai décidé d’aller un peu plus loin. Mais je ne veux pas être étiquetée comme l’illustratrice qui parle d’éducation et de violences conjugales donc je déborderai bientôt sur de nouveaux thèmes, qui ne seront pas forcément du vécu d’ailleurs mais qui me prennent tout autant aux tripes.

         

Sur les réseaux sociaux, tu as aussi abordé ton hypersensibilité. Comment la conjugues-tu avec la dureté d’internet ?

Haha ! Oui, c’est un fardeau assez commun chez pas mal d’artistes j’ai l’impression. Je n’en souffre pas, ou plus en tout cas, donc je l’ai abordé d’une façon humoristique. Mais c’est vrai que parfois ça ne fait pas bon ménage avec les détracteurs. J’ai la chance d’avoir pour un commentaire désobligeant, le centuple de soutien. C’est la forme de l’attaque qui est blessante, parce que le fond lui, permet de se remettre en question. Je soulève des sujets sensibles, j’ai conscience que je ne pourrai pas plaire à tout le monde mais à moi de trouver une forme plus inclusive ou plus douce pour amener la chose.

Quelles sont tes inspirations au quotidien ? Et comment choisis-tu tes prochains sujets ?

Quand j’ai une idée, j’aime la décliner en série donc en général une “bonne” idée peut me tenir suffisamment longtemps pour ne pas être en manque d’inspiration. Mais quand vient la page blanche, je me pose pour écouter des podcasts, lire des articles, regarder un film… Il y a tellement de sujets et de personnes passionnantes que je crois que le jour où on aura plus besoin de prendre la parole sur un sujet n’est pas prêt d’arriver. L’exercice le plus difficile est de trouver comment parler de quelque chose qui a sûrement été abordé des dizaines de fois, sans être redondant.

         

Que dessines-tu juste pour le plaisir ?

Ça fait un sacré moment que je n’ai pas dessiné pour moi, en plus je dois avouer que je n’aime pas vraiment dessiner de “belles images”. S’il n’y a pas un message derrière, je n’ai absolument aucune facilité à créer des dessins purement esthétiques. Mais pour répondre quelque chose, sur le plan technique, ce que j’adore dessiner ce sont les cheveux.

As-tu des conseils pour les jeunes illustrateurs qui se lancent ?

Se trouver un réseau, ma plus grande force c’est d’être entourée par une merveilleuse troupe de collègues, illustrateur.rice.s, auteur.ice.s, avec qui j’échange tous les jours. Ils sont une source de motivation infinie. Ils me font gagner du temps sur mes réflexions, sur les questions administratives qui peuvent vraiment prendre la tête. Et on est toujours là pour parler de nos projets et se donner plus de visibilité.

Tu as travaillé sur la publication d’un livre, Et si on changeait d’angle, récemment. Peux-tu nous en parler ?

Je viens tout juste de le terminer, il sortira en juin. C’est un livre qui reprend une série d’illustrations qui placent l’adulte dans des situations habituellement vécues par des enfants. Une façon de remettre un peu d’empathie au cœur de notre relation avec les plus jeunes. C’est drôle mais aussi un peu bousculant, je suis très fière du rendu final même si je sais que dans deux mois, je ne pourrai plus regarder ces illustrations sans les trouver horribles (rires)! 

         

Pour finir, as-tu d’autres projets en cours ou des idées de projets à venir ?

C’est du temps qui me manque. J’ai tellement d’idées en tête, je suis à peu près sûre que dans les années à venir, je sortirai une BD sur le sujet des migrants. C’est un sujet qui me trotte dans la tête depuis trop longtemps pour que je ne m’y attelle pas enfin. Mais pour l’instant, je renfloue un peu les caisses avec des projets professionnels hors édition. Demain, je commence un contrat autour de la sensibilisation à la sclérose en plaque. Je me sens tellement reconnaissante d’être impliquée dans des thèmes pareils simplement grâce à mon coup de crayon.

Retrouvez Fanny Vella sur Instagram ici, et le lien pour trouver et commander tous ses projets ici.

Propos recueillis par Léa Héron


À découvrir sur Artistik Rezo :

BD 2020 : “Toute la France dessine” , de Hélène De Montalembert

 

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